Josep Maria Sala-Valldaura
(Catalogne, 1947)





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Biographie


Né à Gironella en 1947, docteur en Lettres Romanes Hispaniques de l’université de Barcelone, Josep M. Sala-Valldaura est poète, critique littéraire et traducteur. Il enseigne la littérature espagnole moderne et contemporaine à l’université de Lleida et a publié plusieurs livres sur le théâtre du XVIIIe siècle et sur la poésie catalane et espagnole contemporaine.

Le travail littéraire de Josep M. Sala-Valldaura comprend une quinzaine de recueils de poésie dont plusieurs ont été primés : Tot extrem voler, Llibres del Mall, Prix « Carles Fages de Climent » (1976) ; En aquest dau del foc, La Magrana, Prix « Cavall Verd » de poésie (1987) ; Disfresses, La Galera, Prix « Critica Serra d’Or » du livre d’enfant (2002), ou le « Joanot Martorell » pour son roman A la vora del pou. L’UNESCO lui a par ailleurs décerné une mention d’honneur pour son recueil de poèmes pour enfants Tren de paraules.

Les poèmes de Josep M. Sala-Valldaura ont été traduits dans de nombreuses langues : anglais, basque, espagnol, français, portugais, roumain et en russe. Son dernier recueil Daltabaix (2012), est paru dans sa version française, traduit par Nathalie Bittoun-Debruyne sous le titre Bouleversements dès 2010.


Poème



AMB UN FARCELL TAQUICÀRDIC DE FONEMES…

Amb un farcell taquicàrdic de fonemes,
la paraula ha abandonat el redós del diccionari
i s’ha enfilat rost amunt
o s’ha escolat claveguera avall
per escoltar el ressò dels buits de la veu
o l’eco ferit dels xiscles del món.

Ha pres el sol a les places dels barris vells,
els que tenen esglésies i putes antigues,
ha confós lletres i lleterades,
ha après faltes d’ortografia
per poder entendre els dolors dels més pobres,
s’ha arrencat les vocals
als hospitals de campanya i en algunes leproseries.

Quan ha comprat una catifa màgica,
hi havia pobres dormint,
i fins els núvols rodons dels seus somnis
no deixaven prou pluja als deserts.

De tornada, ha apagat el flexo
i l’he sentida plorar damunt el paper,
com un pardal petit de tinta blanca.

(Daltabaix / 2012)


LESTÉ D’UN BALUCHON AGITÉ DE PHONÈMES…

Lesté d’un baluchon agité de phonèmes,
le mot a quitté le refuge du dictionnaire
et gravi une pente
ou dégringolé dans les égouts
pour écouter la sonorité des voix silencieuses
ou l’écho blessé des cris du monde.

Il a pris le soleil sur les places des vieux quartiers,
auprès des églises et des putes fanées,
a confondu lettres et latrines,
a appris des fautes d’orthographe
afin de comprendre les maux des miséreux,
s’est arraché les voyelles
dans les hôpitaux des tranchées et les léproseries.

Des mendiants dormaient
sur le tapis volant qu’il s’était acheté,
et les nuages ronds de leurs rêves
ne pleuvaient pas assez sur le désert.

À son retour, il a éteint la lampe
et je l’ai entendu pleurer sur le papier,
comme un tout petit moineau d’encre blanche.

(Bouleversements / 2010
traduit du catalan par Nathalie Bittoun-Debruyne)



PARAULES DEL NOSTRE PARE CAÍN

En plena alta mar,
els albatros moriren de set.

Lluny dels quatre rius i l’Edèn,
els àngels caiguts perderen o vengueren les ales.

Atemorit que no em matin,
erro
     errant,
         errat.
On és mon germà?

(Daltabaix / 2012).


PAROLES DE NOTRE PÈRE CAÏN

En haute mer
les albatros sont morts de soif.

Loin des quatre fleuves et de l’Éden,
les anges déchus ont perdu leurs ailes, ou les ont vendues.

Craignant de me faire tuer,
j’erre,
     errant,
         erreur.
Où est mon frère ?

(Bouleversements / 2010
traduit du catalan par Nathalie Bittoun-Debruyne)